14 avril 2008

Petits principes iconographiques

J'ai laissé traîner plusieurs semaines le Bulletin de la Société française de numismatique de janvier 2008 avant de trouver le temps de le lire. Voilà qui est fait et je n'ai pas été déçu : tout son contenu portait sur la numismatique médiévale (ce qui m'a désolé de n'avoir pu assister à la réunion ayant donné lieu à ces échanges).
Pour info, voici les deux communications :
  • SACCOCCI (Andrea), « Virgile et les saints patrons : un païen dans le monnayage épiscopal de Mantoue (XIIe-XIVe siècle) », BSFN, 2008, vol. 63, n° 1, p. 2-12
  • CHAREYRON (Régis), « Un denier inédit de Pastor de Sarrats, archevêque d’Embrun de 1338 à 1350 », BSFN, 2008, vol. 63, n° 1, p. 12-14
Les deux sont extrêmement intéressantes, mais la première surtout contient une réflexion sur la "bonne" manière (la manière légitime) de décrypter l'iconographie numismatique. Je m'empresse de vous retranscrire ces passages que je fais miens :
« Il faut dire que la monnaie, sous le profil juridique, est un objet qui exerce ses fonctions (unité de compte, moyen d'échange, etc., même dans le domaine privé (qui n'est pas sujet au contrôle direct de l'Etat) avec "force de loi", c'est-à-dire que l'utilisation par le public de cet objet est, d'une part garantie, de l'autre rendue obligatoire par un Etat. Par conséquent, tout ce qui y est imprimé a pour but d'indiquer et de rendre identifiables les pouvoirs attribués à la monnaie pour accomplir de telles fonctions [...]. En d'autres termes, et en simplifiant à l'extrême, je pense que les légendes et les représentations monétaires doivent satisfaire, pour la monnaie, à la même fonction que les poinçons sur les plateaux des balances d'usage public, aussi bien que les cachets, les signatures et les souscriptions pour des documents notariaux [...]. Les autorités monétaires, évidemment, tiennent compte de cela, et donc insèrent dans l'iconographie de la monnaie des éléments qui permettent [d'un côté] d'identifier immédiatement les responsables de chaque émission, de l'autre de rendre plus difficile la falsification.
« La monnaie, enfin, a aussi une fonction économique qui en justifie l'existence même, donc sa typologie est fortement conditionnée par cette fonction, elle n'est jamais arbitraire. En conséquence beaucoup de choix iconographiques, un fois satisfaites les exigences indiquées plus haut, peuvent être simplement justifiées par la nécessité d'imité de façon plus ou moins fidèle le type de quelque monnaie connaissant une grande popularité. [...]
« Je pense qu'à l'époque médiévale, surtout avant le XIVe siècle, les aspects que nous avons indiqués plus haut semblent justifier la presque totalité des typologies monétaires attestées. C'est donc dans ce domaine, avant tout juridique et ensuite économique, que nous devrions rechercher l'explication de choix épigraphiques ou iconographiques pas encore éclaircis, en réservant à un autre moment les interprétations sur la fonction symbolique. »

Donc si l'on veut interpréter l'iconographie d'une monnaie, il faut d'abord commencer par expliquer en quoi elle satisfait aux contraintes juridiques (désigner l'émetteur) et économiques (aider la monnaie à s'insérer dans la circulation des autres monnaies) avant de vouloir donner des explications religieuses ou ésotériques.

Cela rejoint tout à fait les observations que j'avais pu faire pour ma thèse : étudiant initialement l'iconographie religieuse sur les monnaies, j'ai été frappé de l'omniprésence du phénomène d'imitation (plus ou moins libre) qui expliquait certaines figures de saints, beaucoup plus que la religiosité du lieu émetteur.

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